Cher.e.s collègues d’Allemagne,
L’année scolaire qui s’est écoulée s’est avérée encore plus délicate et anxiogène que la précédente. Outre les fermetures des établissements, les confinements annoncés parfois au dernier moment dans le cadre de protocoles sanitaires changeants, nous avons dû faire face à la légèreté avec laquelle le ministère de l’Éducation Nationale a aménagé les épreuves d’examen (DNB, Baccalauréat), montrant le peu de considération dont il est fait cas, au sommet de la hiérarchie, pour le travail des enseignants et le stress des élèves. Il faut supposer que pour fabriquer des premiers de cordée, notre système éducatif doit le plus tôt possible générer des situations de tensions inutiles que Parcoursup exacerbe pendant l’été pour les bacheliers en attente d’une inscription en formation supérieure.
Les vacances d’été doivent permettre de nous ressourcer, force est de constater qu’elles sont écornées avec l’aval de l’AEFE à Berlin, à Munich, à Hambourg. Pour protester contre l’allongement de l’année scolaire décidé unilatéralement par les autorités de tutelle et sans concertation aucune avec les personnels (mis au courant via un changement en avril du calendrier scolaire publié sur le site du lycée … ) des préavis de grève ont été posés pour les 27, 30 et 31 août au Französisches Gymnasium de Berlin.
L’année scolaire précédente devait être l’occasion de négocier avec l’AEFE les différentes composantes des rémunérations des professeurs détachés sous contrat de résident. Ces négociations n’ont toujours pas eu lieu. Elles prévoient notamment, comme je vous l’avais écrit l’an passé, de discuter de l’évolution de l’avantage familial pour les professeurs résidents et de l’ISVL (Indemnité Spécifique de Vie Locale). Il est impératif dans le cadre de ces négociations de maintenir les différents statuts de détachés existants (expatriés et résidents détachés auprès de l’AEFE) et de ne pas céder aux sirènes de syndicats qui voient dans un statut unique le moyen d’améliorer les conditions d’emploi moyennes des enseignants du réseau, voire qui soutiennent l’idée que nous passions toutes et tous en contrat local sous détachement direct.
Un statut unique, c’est certainement s’orienter vers la disparition à terme de certains avantages accordés aux résidents qui sont en fait rattachés aux conditions de traitement des expatriés (l’ISVL des résidents est reliée à l’Indemnité d’Expatriation des expatriés et l’avantage familial aux majorations familiales des expatriés).
Un détachement direct permet certes de voir son échelon progresser virtuellement (l’ancienneté à l’étranger est prise en compte dans le niveau de rémunération en cas de retour en France). Mais cela veut dire aussi, comme le savent nos collègues en Allemagne dans cette situation, renoncer à cotiser pour une retraite en France (cela demeure possible mais se révèle dans la pratique trop onéreux), être employé dans des conditions locales qui, si elles ne sont pas trop déplorables en Allemagne – même pour des agents non reconnus comme fonctionnaires – peuvent l’être dans bien des pays.
Concernant les personnels de droit local (PDL), la négociation en vue d’éliminer la limitation de la reprise d’ancienneté à 5 ans lors de l’emploi de nouveaux collègues a été également reportée pour cause de pandémie. Cette règle continue de poser des entraves évidentes à un recrutement de qualité et nous reviendrons avec le service culturel sur ce thème.
Globalement, les discussions entre le SNES et la direction de l’AEFE sont de plus en plus difficiles car, si pendant des années, l’objectif était partagé (développer un enseignement public français de qualité à l’étranger) – à défaut évidemment de partager la même conception des moyens pour atteindre cet objectif – aujourd’hui, les objectifs diffèrent fondamentalement. La priorité de l’AEFE est désormais de parvenir au doublement du nombre d’élèves du réseau entre 2017 et 2030, objectif voulu par le Président de la République. Après avoir subi une amputation de son budget de 33 millions d’euros et dû supprimer 500 postes de détachés soit environ 10 % des postes de détachés en début de quinquennat, c’est avec une rallonge budgétaire de 25 millions que l’AEFE doit doubler le nombre d’élèves du réseau … Seul moyen pour y parvenir, développer des partenariats avec des institutions privées, telles que le réseau scolaire Odyssey présidé par Luc Chatel, et s’orienter sans complexe vers un réseau d’enseignement français à l’étranger intégralement privé.
Dans ce contexte, nous devons plus que jamais nous montrer uni.e.s et savoir nous mobiliser du côté des seul.e.s qui tiennent des discours cohérents et clairs, conformes à nos convictions.
Je ferai en sorte de vous rendre visite dans vos établissements autant que la situation sanitaire le permettra dans le courant de l’année scolaire ou à défaut, de m’entretenir avec vous en visioconférence, comme nous l’avons fait l’an passé avec les collègues de Fribourg et vous dis donc à bientôt !
Sébastien Illiano, Secrétaire du SNES Allemagne